YVES CONSTANTINIDIS CONSULTANT

L’expression des besoins, ce n’est pas compliqué !

Exprimer les besoins toujours une opération complexe.

Exprimer les besoins ne devrait jamais être compliqué.

Compliqué ne veut pas dire complexe. Compliqué veut dire inutilement complexe. Nuance importante.

Prendre conscience que l’expression des besoins est une opération complexe permet de chercher, et de trouver, les outils et la méthode pour gérer cette complexité et élaborer une démarche claire, cohérente et accessible à tous. C’est ce que j’ai fait pour moi-même pendant vingt ans, que je fais maintenant pour mes clients et que j’enseigne à la fac.

Élaborer un cahier des charges consiste avant tout à traduire des besoins flous, imprécis, et parfois inconnus, en exigences structurées et organisées. A les traduire donc, depuis le langage du client en un langage compréhensible de tous, client, fournisseur et observateurs extérieurs.

Rappelons les opérations de base …

Présentons les différentes tâches qui vont du recueil des besoins au cahier des charges.

La première tâche consiste à découvrir les enjeux, les objectifs, et les contraintes du projet. Les enjeux constituent la raison profonde de lancer un projet, les intentions derrière les objectifs. Certains enjeux seront clairs et pourront être exprimés dans le préambule du cahier des charges. D’autres enjeux pourront être cachés (ambitions personnelles, projet inavoué de dépasser un concurrent). Qu’ils soient publics ou tenus secrets, ils devront être analysés, pris en compte. Les objectifs, eux, devront être formalisés. Ils constituent les exigences de plus haut niveau. Les contraintes ne sont qu’une forme particulière d’exigences, présentés « en creux ».

Une tâche importante consiste à identifier les différents acteurs du projet (les parties prenantes, en particulier les représentants des futurs utilisateurs), à connaître les enjeux les plus importants pour chacun d’eux, à établir un dialogue, à les faire participer au projet d’élaboration.

Là, on a fait le plus difficile. Pas le plus long, mais le plus difficile ….

Maintenant, il suffit d’appliquer une méthode …

Recueillir les besoins est une tâche beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît. Les besoins sont rarement à la surface du sol. En anglais, le terme utilisé pour le recueil est elicitation. Il peut se traduire par « extraction ». Les vrais besoins sont donc cachés, et diverses techniques permettent de les « déterrer » : les réunions de travail, les interviews des utilisateurs, l’observation directe, la lecture de documents (y compris d’autres cahiers des charges). Il n’y a pas de technique plus efficace qu’une autre, tout dépend du contexte, et c’est une combinaison de techniques qui permettra un recueil complet.

Ainsi recueillies, les exigences seront analysées. Analyser les exigences, c’est les faire passer par des « filtres », les examiner pour détecter les exigences manquantes, contradictoires, les incohérences à divers niveaux. Une analyse efficace des exigences permet de toujours rester au meilleur niveau de détail. Le niveau de détail nécessaire dépend des intentions du projet. Par exemple, on n’exprimera pas le même niveau de détails pour un projet de développement spécifique et un choix de logiciel sur étagère. De plus, il faudra établir des priorités entre exigences.

Il va falloir ensuite rédiger les exigences, généralement sous forme de cahier des charges. La forme peut être textuelle ou graphique. Il n’y a pas de forme a priori meilleure qu’une autre. Tout dépend de celui qui va lire le cahier des charges, l’important étant de donner une vision et une compréhension partagées des exigences. La représentation graphique fait appel à des techniques de modélisation des données ou des traitements informatiques.

Vu du rédacteur, le cahier des charges n’est qu’un lieu de stockage des exigences. Mais les exigences évoluent. Gérer les évolutions fait également partie de ce qu’il est convenu d’appeler l’ingénierie des exigences. A un instant donné, une version du cahier des charges peut être en cours d’utilisation (par les équipes de concepteurs, par exemple), une autre en cours d’élaboration. Ce sont alors des techniques de gestion des versions et de la configuration qui seront utilisées.

Enfin, les exigences devront être validées par les différentes parties prenantes. Cette validation se fait à plusieurs niveaux. Les futurs utilisateurs valideront souvent au fur et à mesure de la rédaction, le donneur d’ordre validera généralement l’ensemble du document.

L’opération est complexe. Mais pas compliquée.

© MMXXII Yves Constantinidis


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