YVES CONSTANTINIDIS CONSULTANT

L’iceberg de la Qualité

L’utilisateur sait reconnaître une application de qualité. Cependant, une grande partie de la qualité du logiciel lui demeure inconnue.

Il y a plusieurs façons de définir la qualité d’une application informatique. À mon avis, la définition la plus exhaustive est la (célèbre) norme ISO 9126 relative à la qualité du produit logiciel, et surtout la série normative ISO 25000 qui lui a succédé (moins célèbre, mais beaucoup plus riche et intéressante).

Selon ISO 9126, la qualité du logiciel peut être perçue sur trois niveaux :

  • La qualité de fonctionnement (quality in use), efficacité relative à l’atteinte des objectifs, la productivité, la sécurité et la satisfaction de l’utilisateur.
  • La qualité externe (external quality) qui correspond au niveau comportemental, visible et mesurable, en particulier lors de tests.
  • La qualité interne (internal quality) correspond au niveau structurel d’analyse, et ne peut être évaluée que par examen du code source.

Cette même norme regroupe les attributs de qualité selon six caractéristiques :

  • La fonctionnalité (en anglais functionality), ensemble des fonctions.
  • La fiabilitéaptitude du logiciel à maintenir son niveau de service.
  • la facilité d’utilisation (usability) souvent appelée « ergonomie ».
  • La maintenabilité (maintainability), effort nécessaire aux modifications.
  • La portabilité (portabilityaptitude à être transféré à un autre environnement.
  • le rendement (efficiency) : temps de réponse et consommation de ressources.

Chaque caractéristique est découpée en sous-caractéristiques. Il y en a 27 au total.

ISO 9126 : 6 caractéristiques et 27 sous-caractéristiques de la qualité du produit logiciel.

Essayons maintenant de combiner ces deux façons de voir la qualité du produit. Dans quelle mesure chacune de ces six caractéristiques énoncées plus haut sont-elles perçues de l’extérieur, par un utilisateur final, sur le terrain, devant son écran, les mains sur le clavier …

A priori, fonctionnalité, utilisabilité, rendement et fiabilité sont directement perceptibles par l’utilisateur final.

Encore que dans la réalité, la qualité du logiciel est plutôt à l’image d’un iceberg …

L'iceberg de la qualité. L'essentiel est invisible pour les yeux.

L’utilisateur ne perçoit qu’une partie des fonctions disponibles, parfois une très petite partie (voir mon précédent article sur l’obésité fonctionnelle).

L’utilisateur est évidemment très sensible à l’utilisabilité (ce que l’on appelle habituellement l’ergonomie du logiciel). Cependant, celle-ci ne se limite pas à l’attractivité et à l’aisance de la navigation. Le logiciel peut induire du stress et de la fatigue de manière sournoise et imperceptible. Après analyse, l’utilisateur ne perçoit l’utilisabilité que partiellement.

Le rendement le concerne, mais pas tant que ça. Le temps de réponse n’est critique pour l’utilisateur que pour certaines fonctions précises.

L’utilisateur est très sensible à la fiabilité, mais le plus souvent il va découvrir la non-fiabilité bien après le déploiement. Des bugs et plantages peuvent apparaître tardivement.

La portabilité et la maintenabilité restent totalement cachés de l’utilisateur, et ne sont perceptibles du client que par leurs effets à très long terme.

Au final, la qualité directement perçue par l’utilisateur n’est qu’une infime partie de la qualité du produit. L’utilisateur ne perçoit que la pointe de l’iceberg. Comme l’écrivait un aviateur célèbre, l’essentiel est invisible pour les yeux.

© Yves Constantinidis, 2022

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